Libramont 2023 – L’agriculture fait partie de la solution
La baseline de la Foire de Libramont se veut explicite tout autant qu’encourageante : « Ici commence un monde durable ». A bien écouter d’ailleurs, la conclusion du propos qui inaugurera cette 87eme édition, il y a lieu de comprendre que les agriculteurs font partie de la solution (et non du problème ?), étant donnés les choix qu’ils comptent mettre en œuvre. Let’s go, dès lors.
Le thème choisi pour cette année, c’est « L’agriculture, une histoire sans faim ». Les ambitions s’énoncent ainsi : Autonomie alimentaire et transmission responsable aux générations futures… partant du fait que « la province du Luxembourg est la plus riche en CO2 (capté). Le ton est donné.
Un court historique rappelle que les agriculteurs travaillent à la poursuite d’un double besoin fondamental : le droit et la liberté de s’alimenter. Pour en parler, sur le plateau, Anne Catherine Dalcq, vice-présidente des jeunes agriculteurs européens, et le Prof. Benjamin Dumont de Gembloux Agro-Bio Tech Uliège, challengés par le Dr. Vét. Léonard Theron.
Il est d’abord questions des enjeux globaux de l’alimentation mondiale. Le cœur de cible, c’est l’accès à une alimentation de qualité, pour tous, une alimentation qui respecte l’environnement. De faim, nous ne mourrons pas en Belgique. Reste qu’une rediversification des exploitations est à envisager car plus de 50 % de nos productions n’est pas orientée nourriture humaine… Pourtant, si le solde de cette réflexion pourrait être de dire que nous mangeons trop de viande (rouge surtout), un propos appuyé précisera que la topographie belge nécessite l’exploitation de grands espaces enherbés (les prairies, intéressants puits de carbone) soutien d’un modèle agricole dit « de polyculture élevage »… Il faut donc continuer de manger de la viande… peut-être moins, peut-être de meilleure qualité, mais rester fidèle au modèle qui nous est spécifique. Les nombreux éleveurs présents dans la salle d’applaudir cette conviction réexprimée en séance inaugurale depuis plusieurs années déjà. Qu’on ne se méprenne pas, Libramont est une foire agricole et commerciale mais aussi, sous la forme d’un grand concours de races, une vitrine de l’excellence des sélections opérées en matière d’élevage.
Evoquant l’avenir des terres d’élevage et les conditions de production agricole, on ne peut faire fi des questions liées au réchauffement climatique. Pluies intenses et sécheresses causent beaucoup de désagréments aux agriculteurs. Plusieurs études le confirment, les cultures d’hiver s’en sortent bien. Ce sont celles de printemps qui souffrent le plus de l’ instabilité de la météo. Raison pour laquelle le modèle alimentaire doit être un modèle basé sur la solidarité entre régions, les aléas climatiques pouvant impactés plus ou moins fortement certains une année et d’autres pas. Les exportations doivent rester une partie de la solution.
Les jeunes agriculteurs sont un public particulier de la Foire. Ils démarrent leur métier au cœur d’une crise… crise climatique et de la biodiversité, crise économique, crise de la biodiversité. Demande changeante des consommateurs aussi… Depuis la fin de la guerre, le monde agricole a pu compter sur une PAC bien financée, octroyant les moyens de son ambition. Si l’on veut que le monde agricole fasse partie de la solution… il faut donc le doter des moyens adéquats. « L’agriculture n’est-elle pas un formidable levier de la biodiversité ? »
A Libramont, on ne peut passer sous silence les enjeux technologiques et techniques. Mais le propos se fait discret… on parle d’agroécologie (mot qui fait peur à beaucoup car on y pressent un jugement sévère du monde agricole). Le chercheur développe sa réponse en 3 temps : Arrêter les surproductions, optimiser les pratiques (agriculture de précision) et oser un système disruptif qui se tourne vers l’écologie : les circuits courts où l’on rencontre les consommateurs. Une conversion qui passe par l’éducation, notamment des enfants, pour combattre l’agri-bashing Gaia ne devrait pas rentrer dans les écoles, proposons plutôt des visites à la ferme pour faire connaître le monde agricole dans sa réalité de terrain.
Les techniques agraires sont d’ailleurs occupées de changer : l’optimisation des prairies, puits de carbone par excellence, labour occasionnel pour un plus grand respect des sols, techniques des couverts et plantation de haies en bordure de parcelles… mais le discours conventionnel est toujours bien là : gardons la boîte à outils la plus complète (entendez notamment, le recours à la chimie et à la phyto quand cela s’avère nécessaire).
« Pas de nourriture sans les agriculteurs et sans éleveurs »… une corporation courageuse, mais vieillissante et à bout de souffle. Le monde scientifique doit être à ses côtés… ainsi que le regard bienveillant des consommateurs. On ne mourra pas de faim en Belgique, certes, mais il faut un soutien au secteur qui, aujourd’hui, ne peut prétendre qu’à un salaire moyen de 14.000 euros en moyenne, un métier à risque qui justifierait une plus grande stabilité pour être exercé dans la sérénité. Libramont se soucie d’eux chaque année. Cette année encore, sont rassemblées sur le champ de foire, 700 expériences de solution pour le monde agricole. Libramont, concluera Monsieur Pierard, président de la Foire, c’est aussi des journées de rencontre, de retrouvailles et de fête. Un grand moment qui dit toute l’importance d’Elever, Cultiver et Transmettre.